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OPERATION EPERVIER : LES PROPOSITIONS DE KOUPIT YOUMO ADAMOU

ADAMOU YOUMO KOUPIT
ADAMOU YOUMO KOUPIT

Dans une sortie musclée, le membre du Bureau politique du l’UDC prend position au sujet de l’opération épervier en cours au Cameroun et propose une solution au pouvoir central. Selon lui, pour l’efficience et la meilleure protection de la fortune publique il faut arrêter définitivement l’opération épervier et créer la CV3R : Commission Vérité – Restitution-Reconversion-Réconciliation. Nous publions ainsi une analyse de YOUMO KOUPIT Adamou.

Lancé par le Président de la République sous la pression de l’opinion publique et des bailleurs de fonds, l’Opération Epervier  était considérée comme une arme à destruction massive contre tous ceux et toutes celles qui auraient abusé des deniers publics d’une façon ou d’une autre. Les vagues d’arrestations se suivaient et se poursuivaient, les unes parfois plus spectaculaires que les autres.

En un laps de temps, tout un gouvernement s’est retrouvé en tôle et n’attend plus que le Président pour clamer la souveraineté de la République des Détourneurs Publics Contemporains. Premier Ministre, Secrétaires Généraux à la Présidence de la République, Ministres d’Etat, Ministres, Secrétaires d’Etat, Directeurs Généraux, Trésoriers Payeurs Généraux, Percepteurs, Caissiers, et autres, la population carcérale des prisons de Douala et Yaoundé, n’en manque plus rien pour leur gouvernance si ce n’est le Président.

Tout le monde ou presque avait cru en l’efficacité, à la pertinence et l’objectivité d’une opération qui n’allait laisser personne qui soit coupable des faits de détournements des deniers publics.

Tout le monde avait cru en la capacité de l’Epervier d’emporter et de briser dans ses ailes, toutes nouvelles velléités d’abus des biens publics par les gestionnaires de la fortune publique camerounaise. Mais cet espoir s’est très vite estompé lorsqu’on a commencé à observer que non seulement l’Epervier prenait du plomb dans ses ailes et commençait à avoir de la peine pour ses vols pourtant toujours tant attendus, mais aussi, il donnait de plus en plus l’impression d’un oiseau frappant à tête chercheuse et au bon grés d’un prince qui a fini par faire croire à l’opinion qu’il avait instrumentalisé l’oiseau au point de le transformer en une arme de combat pour la neutralisation et l’étouffement de toute intention d’adversité politique intérieure par les membres de sa famille politique qui doivent reconnaître qu’ils sont tous des créatures du créateur et se comporter conséquemment en œuvrant exclusivement par des louanges et autres moyens multiformes pour la perpétuation du pouvoir de leur créateur plutôt que de nourrir des ambitions de passer un jour du statut de créature à celui de créateur.

En réalité, plusieurs années après, ils ne sont plus nombreux ceux des Camerounais et de l’opinion publique internationale qui croient encore en la sincérité, en l’objectivité et en la pertinence de l’Opération Epervier initiée et conduite de mains de maître par le Président de la République. Le bilan est tellement mitigé qu’on pense que l’Epervier a fait plus de mal que de bien.

On peut relever entre autres : l’absence d’équité, des lenteurs voulue dans la diligence des procédures, une justice à plusieurs vitesses et des violations flagrantes des lois, beaucoup de dépenses pour très peu de recettes, et au finish, la corruption et les détournements continuent à gangréner.

  • Absence d’équité: on ne comprend pas pourquoi, étant présumés coupables des faits similaires ou parfois relativement plus graves, certains sont interpelés et soumis à la détention provisoire, tandis que d’autres ne font même pas l’objet des poursuites judiciaires. Parmi ces derniers, les plus malchanceux ont été tout simplement déchargés de leurs fonctions, alors que d’autres ont été soit mutés, soit promus et continuent sereinement à vaquer dans la mangeoire nationale. Lorsqu’on a créé le TCS (qui est un tribunal d’exception et de faveur injustifiée contre lequel je continue à m’insurger), on a dit qu’un détenu pouvait être relaxé sur abandon des poursuites s’il rembourse le corps de délit. Or certains ont pu rembourser et bénéficier de cette mesure, tandis que d’autres l’ont fait et continuent à être maintenu en tôle. Dans un pays dont la constitution proclame l’égalité de tous devant la loi et l’équité dans le jugement, on ne comprend pas pourquoi, celui qui vole cinquante millions et rembourse au cours des poursuites judiciaires conséquentes engagées contre lui, peut rembourser et être relaxé purement et simplement tandis qu’un pauvre qui vole un pain pour se nourrir parce qu’il a faim, doit purger la peine d’emprisonnement ferme même s’il paye le prix du pain volé
  • Les lenteurs judiciaires préméditées : La durée de l’instruction fait parfois que certains détenus passent près d’un an en prison avant de voir leurs procès s’ouvrir. Et quand ils sont ouverts, les procès subissent des renvois systématiques et intempestifs, prenant plusieurs années durant avant que le verdict ne soit rendu parfois pour innocenter le prévenu des faits qui lui ont été reprochés et justifié son arrestation.
  • Justice à plusieurs vitesses: L’Epervier est reconnu pour sa célérité quand il s’agit des uns, et son extrême lenteur quand il s’agit des autres. La vitesse dans la conduite et la diligence des procédures et procès, est tributaire des réalités que seuls l’initiateur des poursuites et ceux qui sont chargés de les exécuter comprennent et maîtrisent. Dans la majorité des interpellations, on viole les dispositions du code de procédure pénale. La détention est devenue la règle alors qu’elle devrait être l’exception si l’esprit du nouveau code de procédure pénal était respecté.
  • Absence de l’efficience qui donne un caractère dépensier à l’Opération Epervier : Depuis son lancement, l’Etat du Cameroun a engagé et dépensé d’énormes sommes d’argent, soit pour payer les renseignements extérieurs, soit pour payer des experts internationaux en matière d’enquête financière et d’espionnage des comptes bancaires spéciaux ouverts par des personnalités camerounaises à l’étranger, soit pour le fonctionnement même des multiples institutions créées dans le cadre de la lutte contre la corruption (CONAC, ANIF, CONSUPE, Cellules anticorruption et un Tribunal Spécial qui est créé dans la mouvance de l’opération Epervier). Sans se risquer dans les chiffres qui ne sont pas officiellement communiqués, je suis persuadé tout de même que le compte de l’Opération Epervier, s’il était spécifiquement tenu comme cela se doit, il serait très largement déficitaire en termes des sommes recouvrées comparées aux sommes dépensées pour aboutir à ces recouvrements. A ce déficit financier direct devrait s’ajouter le déficit moral et social qui ne saurait être évalué et de l’image de même de l’Etat. En réalité personne dans la classe gouvernante, n’ignore la perte en termes de dégradation de l’image du pays tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, lorsqu’on voit que les personnalités qui devraient servir de référence pour la jeunesse, constituent aujourd’hui tout un gouvernement en prison pour avoir volé l’argent public. Parmi eux, se trouvent des universitaires qui ont dirigé telle ou telle thèse ou tel mémoire ; quand un titulaire de ces thèses et mémoires se retrouvent par exemple à l’Etranger et brandit son parchemin, à la lecture du nom de son directeur de thèse on ne manquera pas de lui demander ironiquement s’il s’agit bien de celui qui est en prison pour vol des deniers publics. C’est dégradant et c’est lourd à porter moralement. A l’intérieur du pays, nos jeunes n'ont plus d'idoles ou de personnalités publiques modèles; ils ont de la peine à trouver dans notre société, des personnalités pouvant encore leur servir de référence. Ce n’est nullement un trophée de guerre que de compter le nombre des sommités de l’élite d’un pays en prison. Des groupes de défense et de pressions sont formés et multiplient des offensives mobilisatrices sur les réseaux sociaux en faveur des détenus présentés comme étant des victimes de l’injustice et comme Prisonniers politiques. Ce qui peut à terme conduire à des tensions sociales pas toujours maîtrisables ;
  • La corruption et le détournement restent une réalité dans le pays : Selon le dernier rapport de Transparency International, l’indice de perception de la corruption (IPC) du Cameroun est passé de 27 à 26. Nous n’avons donc gagné qu’un seul point d’indice qui nous a propulsés de 130ème au 145ème rang dans le classement mondial où le Danmark et la Nouvelle Zélande trônent en tête avec chacun un IPC de 90. Sans être négligeable, ceci n’est pour autant pas un motif de grande satisfaction car les 15 places gagnées dans le classement à la suite d’une amélioration d’un seul point d’indice, est bien plus dû à la montée de la corruption au niveau mondial qu’à un réel recul de ce phénomène dans notre société. C’est de lapalissade que de dire qu’il y a désormais dans notre pays, le développement des nouvelles techniques plus sophistiquées de détournement et de corruption qui échappent à la méthode classique de perception pratiquée par les fins limiers du système et par Transparency International. Mais l’indicateur le plus visible est là, et ne demande aucune expertise ni un confort intellectuel spécial pour voir. C’est le fait que dans notre pays, ce soient les fonctionnaires, Contractuels et Agents de l’Etat qui sont plus riches que les opérateurs économiques privés communément appelés Hommes d’affaires alors qu’il est établi que la fonction publique camerounaise applique une grille de salaire reconnue parmi les plus basses de l’Afrique.

La solution répressive comme moyen de lutte contre la corruption a démontré ses limites et il faut passer à autre chose qui favorise et renforce la négociation et la prévention.

En management, il est connu que lorsque dans une société, la dérive devient la règle et non l’exception, lorsque le vol et les détournements deviennent aussi généralisés, il faut chercher la cause dans le système et les procédures qui régissent le fonctionnement du système et non plus dans les acteurs du système. L’Etre Humain est en perpétuel combat entre ses propres intérêts et l’intérêt général de la communauté lorsqu’il se trouve là où il doit œuvrer pour toute la communauté. Il revient donc à la Communauté de ficeler les règles et procédures qui verrouillent au mieux, les possibilités d’un abus quelconque par l’acteur sociétal qui est avant tout un Etre Humain. C’est ce à quoi renvoie la gestion des risques opérationnels. Vu sous cet angle et en considération de la gouvernance politique qui reste permissive et laisse émerger à dessein, la confusion entre le patrimoine de l’Etat et celui du Parti au Pouvoir en transformant la fonction publique en une excroissance du parti et en encourageant implicitement les acteurs politiques du parti, travailleurs publics à l’entretien matériel et financier de leurs bases tribales afin de garantir leur « soutien » au Parti, il faut conclure que l’Etat est majoritairement responsable de la généralisation et de la systématisation de la corruption dans notre pays. Si on n’arrête pas définitivement l’opération Epervier, l’Etat va persister dans l’injustice, ou alors il va lui falloir créer toute une ville entière pour accueillir et héberger tous les potentiels pénitenciers reconnus coupables de faits de détournements et de corruption.

Il faut par conséquent que l’Etat se ressaisisse et prenne conscience de la situation pour changer de méthode.

C’est dans cette perspective que je propose l’Arrêt définitif de l’Opération Epervier et la création immédiate de la Commission Vérité-Restitution-Reconversion –Réconciliation en abréviation : CV3R.

La CV3R aurait pour mission :

 

  1. De se saisir de tous les dossiers disponibles à la Présidence de la République et issus des rapports des contrôles du CONSUPE, de la CONAC, de la Chambre des Comptes et de l’ANIF,
  2. De les examiner en profondeur de manière à arrêter scientifiquement pour chaque gestionnaire, tout ce qui s’avère être un détournement
  3. De convoquer les gestionnaires concernés à l’effet de les entendre, leur donner la possibilité de justifier ce qui est justifiable, et au finish, d’arrêter contradictoirement ce qui s’avère définitivement injustifiable et donc considéré comme du détournement ;
  4. Convenir avec chaque gestionnaire concerné, du plan de remboursement amiable du montant qui aura été arrêté comme ayant été détourné. Ce plan de remboursement devant être réaliste et assorti des garanties en termes d’inscription hypothécaires en 1er rang par devant Notaire ;
  5. Les gestionnaires concernés, après la 4ème étape ci-dessus, prêtent serment devant la commission ou devant tout autre symbole fort de la République, de se Reconvertir et de ne plus jamais nourrir une intention d’abuser de la fortune publique.
  6. Elaborer et faire voter sous forme d’une loi promulguée par le Président de la République, la déchéance de tous les gestionnaires concernés pour une période de 10 ans pendant laquelle ils ne pourront être ni nommés à un poste de responsabilité dans l’administration, ni se porter candidat à une fonction élective au niveau municipal, régional, législatif et présidentiel ;
  7. Engager et superviser un audit technique des procédures en vigueur dans la fonction publique dans la perspective d’une véritable refonte et d’informatisation de la majorité des opérations ;
  8. Elaborer une charte éthique et morale publique qui recense et ressorte tout ce qu’un commis de l’Etat doit faire, ce qu’il ne doit pas faire, et les sanctions qui s’appliquent sur lui en cas de défaillance. Ces sanctions, qui incluraient les aspects disciplinaire, professionnel et judiciaires, devraient être des plus sévères, allant jusqu’à la peine d’emprisonnement à vie (pas de peine de mort), prévoyant au passage, une séance publique d’humiliation où le coupable, avant d’aller en prison, est hué publiquement par le peuple qui lui crie dessus. Faire voter cette charte sous forme d’une loi promulguée par le Président de la République et conduire une campagne de sa vulgarisation ; faire introduire cette charge dans le programme scolaire et universitaire, et instaurer un service militaire obligatoire pour tout jeune Camerounais l’année suivant l’obtention de son baccalauréat avant qu’il ne s’inscrive à l’Université, dans une école professionnelle ou ne s’engage dans une profession quelconque (privée ou publique)
  9. Prendre les dispositions techniques adéquates et faire appliquer l’article 66 de la Constitution.
  10. Prendre les dispositions techniques, formalisées et faire voter sous forme d’une loi, interdisant toute activité de politique politicienne dans les services publics de l’Etat et faire inscrire dans la Constitution au chapitre des fonctions incompatibles à celles du Président de la République, les fonctions de Président d’un Parti politique ou de toute organisation à rôle politique.
  11. De veiller à la création d’une cour des comptes en lieu et place de la chambre de comptes que nous avons actuellement.

Lorsque la Commission aura rendu son rapport définitif, sa mission sera terminée et elle aura fermée la page noire actuelle et ouvert une nouvelle phase pour une nouvelle République.


      YOUMO KOUPIT Adamou

Gestionnaire Financier, Consultant en Microfinance

Expert en Suivi/Evaluation des Projets

Membre du Bureau Politique de l’UDC

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